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Comment photographier une éclipse solaire ?

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Phénomène rare, née d’une conjonction astronomique unique, les éclipses solaires fascinent depuis des millénaires. Après avoir parcouru le monde et photographié nombres d’entre elles, je vous livre ici mes conseils sur comment photographier une éclipse solaire.

 

Comment photographier une éclipse solaire

Qu’est-ce qu’une éclipse solaire ?

Une éclipse solaire se produit lorsque notre satellite naturel ayant un diamètre apparent identique, passe devant le soleil en journée et vient en occulter sa lumière, créant ainsi un cône d’ombre projeté sur la surface terrestre. Pour pouvoir observer ce phénomène astronomique, il vous suffit alors de vous rendre dans ce que l’on appelle la « bande de totalité ». Nous aborderons durant cet article comment photographier une éclipse solaire totale ou annulaire. Pour en savoir plus sur ce phénomène céleste, nous vous invitions à consulter l’article qui explique en détail la formation d’une éclipse.

Comment choisir l'éclipse à photographier ?

La toute première chose à déterminer est déjà de savoir où sera visible le prochain alignement entre le soleil et la lune. Pour y répondre rien de plus simple. Il existe plusieurs sites internet qui proposent les trajectoires, orbites, dates et heures des convergences pour les années à venir. A titre personnel, j’utilise le site de Xavier Jubier qui est une véritable mine d’informations. En plus du tracé, il y décrit ses repérages et la météo dans le pays ou région qu’il choisit. Il y explique notamment son choix par le biais de différents critères.

Me concernant, pour déterminer la prochaine éclipse solaire observable, c’est un mix de 3 critères :

Premier critère : La magnitude

La magnitude d’une éclipse est la proportion du diamètre du corps éclipsé lors d’un tel événement. Dans le cas d’une éclipse totale, la magnitude est supérieure à 1,0. Dans le cas d’une éclipse partielle ou annulaire, cette valeur est comprise entre 0 et 1,0. Ce résultat indique le rapport au rayon du corps éclipsé que le corps occultant dépasse (dans une éclipse totale) ou bien qui est débordé (dans une éclipse partielle ou annulaire).

En résumé, pour des photos spectaculaires, privilégié les éclipses solaires totales aux éclipses annulaires voire partielles.

Deuxième critère : l’altitude

J’entends par altitude à quel angle se trouvera l’astre par rapport à l’horizon au moment de la conjonction dans les pays traversés. S’il dépasse les 40° au-dessus de l’horizon, je ne m’attarde pas plus longtemps sur cette zone. Si je pose arbitrairement 40°, c’est que par expérience, comme lors de  l’éclipse solaire totale sur le continent américain,cela devient très compliqué au-delà de cette angle, lorsqu’il s’agit d’intégrer une personne dans la composition tout comme le soleil (cf photo ci-jointe ).

Troisième critère : l’accessibilité

J’entends par accessible, une région où je peux me rendre sans une débauche de moyens et d’argent dans la zone de visibilité. En tenant compte du premier critère, il doit vous rester 1 voire 2 pays. En général, ce sont ceux où débutera ou prendra fin l’éclipse, ceux qui offrent les angles d’observation en dessous de 45°. De là, je détermine quel endroit/région est la plus « accessible « . Ex : éclipse de fin 2021 en Antarctique à oublier… ( à moins de vider votre compte bancaire ).

Quatrième critère : la météo

Vérifiez la météo à cette période de l’année et dans cette région. Tout comme le chasseur d’aurore que je suis, il faut éviter au maximum la couverture nuageuse. Pour l’anticiper, surtout plusieurs mois à l’avance, une fois de plus le site de Xavier Jubier fournit des cartes avec l’historique des conditions météorologiques à cette période.

Normalement, avec ces 3 critères vous devez arriver à pouvoir sélectionner la zone où vous comptez vous rendre pour photographier l’occultation et profiter du phénomène. Maintenant que vous savez où aller, il vous reste à créer la photo ! (cf photo ci-jointe )

Comment choisir votre composition

Premier paramètre à prendre en compte, l’angle d’observation au moment de la convergence. Entre une éclipse à 10° au dessus de l’horizon et une à 40°, vos choix de compositions se seront pas les mêmes. De plus, vous devrez tenir compte de la topographie du terrain, si vous êtes dans une région montagneuse, avec des dunes, des lacs. Il faudra prendre en compte tous ces éléments et vous pourrez déjà  » imaginer «  la photo que vous souhaitez créer. Me concernant, jusqu’à présent mon souhait était de créer des compositions avec un élément humain et l’éclipse. Donc j’ai toujours privilégié les régions offrant des reliefs.

Si c’est votre souhait également, alors de préférence utilisez un plein format, car sa résolution vous permettra de croper dedans,  alors qu’à l’inverse… Ceci dit, un APS-C est un très bon choix également car avec son coefficient multiplicateur, c’est comme si vous aviez un zoom déjà intégré. Pour rappel, un 200 mm sur canon ( x 1,6 ) donne 300 mm et 320 sur Nikon (x 1,5 ).

Côté optique, idéalement un télé-zoom 150 – 600 mm pour un cadrage serré. Si c’est pour une photo de type paysage, un grand angle 16 – 35 mm, nullement besoin qu’il soit lumineux, l’idée étant d’avoir votre premier plan et l’éclipse nets.

Le matériel :

    • De préférence un plein format pour pouvoir croper ou APS-C pour le coef de multiplication
    • Un objectif 70-200 mm et un doubleur
    • Un grand angle type 16 – 35mm
    • Un trépied stable !

Partout ou presque vous lirez qu’il faut utiliser des filtres pour photographier le soleil, filtres qui vont protéger votre capteur de l’intensité des rayons du soleil. Dans l’absolu, c’est vrai … Dans la pratique, je conseille de les enlever 5 min avant, après le maximum et surtout pendant. Par leur opacité, les filtres ne permettent pas de réaliser des images abouties. Puisqu’ils bloquent une grande partie de la lumière du soleil et les ombres qui vont avec, comme sur cette image.

Comment choisir votre "spot"

Faites des repérages :

Pour cette partie, deux outils vont vous être utiles. Toujours les cartes disponibles sur le site de Xavier Jubier et celles sur Google Maps. Le premier va vous permettre d’affiner le secteur en étudiant la bande de centralité de l’éclipse et quelle topographie elle traverse ( lac, montagne, dune etc …), éléments qui pourraient servir dans la composition. Le deuxième pour voir l’accessibilité du spot ( proximité avec route, piste ) et une vision plus fine de la topographie. Enfin, pour quantifier également l’éloignement de votre logement jusqu’au spot. Étant donné que vous serez amené à venir durant plusieurs jours d’affilés sur le spot pour travailler votre cadrage, autant éviter d’avoir 3h de route si possible !

Ex de composition : si je sais que l’éclipse sera basse à l’horizon, il sera possible d’intégrer son reflet dans un lac. Crédit photo Thierry Legault

Pour l’éclipse solaire totale au Chili, j’avais sélectionné la région près de la ville de San Juan. D’une part, pour son climat favorable, d’autre part pour le relief qu’elle offre; enfin, pour la possibilité de me loger à proximité de la bande de totalité.

Une fois la zone de prospection sélectionnée, rien de mieux qu’un repérage sur le terrain pour juger de vous même. Pour une personne qui souhaite assurer pour une première photo, je conseille minimum 1 semaine, voire plus selon la complexité de votre image. Pour info, pour l’éclipse totale de soleil en Oregon, j’ai passé plusieurs jours à arpenter très tôt les sentiers de Smith Rock.

Maintenant que vous avez déterminé votre secteur et les potentiels spots, rendez-vous sur place pour jauger du temps d’accès nécessaire, si le terrain est accidenté ou non. Enfin, le plus important, comment le spot fonctionne au moment du maximum. Si comme moi vous souhaitez intégrer une silhouette humaine, soyez attentif à l’ombre au moment où le soleil va être éclipsé.

Imprégnez-vous du terrain :

Observer simplement la projection de l’ombre de la montagne/colline sur le sol et placez vous y. Dans le même temps pour regarder le soleil et sa position avec le sujet, une simple paire de lunettes spéciales suffit. Vous pouvez aussi faire des tests en protégeant « grossièrement » le temps de la photo votre capteur avec un filtre type ND 1000.

J’ai procédé ainsi pour l’éclipse de 2019 en Amérique du sud et celle d’Oman en me positionnant tous les jours 1h avant l’heure du maximum. L’idée est aussi de déterminer si je suis assez loin et bien positionné au moment de la totalité. Autre point important à vérifier durant vos repérages, c’est la possibilité de se déplacer aisément durant les quelques minutes qui précédent et suivent le maximum.

L’idée est de pouvoir bouger sans obstacle vers l’avant si l’éclipse est au lever de soleil, vers l’arrière si c’est au coucher de soleil (idéalement terrain plat). Vous pourrez ainsi vous déplacer et garder le même angle et donc autant plus de chances de réaliser plusieurs images, surtout si comme moi vous créez des images avec un 400 voire 600mm.

Comme je sais qu’à telle focale l’éclipse aura telle proportion, j’ai juste à déterminer à quelle distance de mon boitier je mets le sujet. Une fois le spot idéal trouvé, on peut parler réglages !

Comment déterminer les réglages

Assimiler la technique

La principale difficulté réside dans la baisse graduelle de l’intensité lumineuse. Au point de se retrouver , dans le cas d’une éclipse totale, dans le noir total au moment où le soleil sera complètement occulté! Vous n’aurez alors qu’une dizaine de minutes pour réaliser des photos. Mon approche pour compenser la baisse de lumière : baisser de 2 à 3 diaph la vitesse d’obturation entre chaque photo jusqu’au maximum de l’éclipse. La principale difficulté, c’est de déterminer à partir de quand démarrer. Difficile à dire … le seul conseil que je peux vous donner: mettez-vous sur le réglage le plus haut et dès que vous estimez que la photo qui apparaît à l’écran est correctement exposée, suivez le processus quitte à ajuster.

Notez qu’une partie sera forcément « cramée » quoique vous fassiez ! Notez aussi que cette baisse des diaph entre chaque exposition ne fonctionne qu’avec une éclipse totale! Une éclipse annulaire laissant passer encore énormément de lumière, vous n’aurez pas une baisse aussi prononcée.

En faisant ainsi, vous n’aurez qu’un paramètre à moduler. Voilà par exemple les réglages utilisés pour l’éclipse au Chili. 

  • F11 – 1/500s – iso 100
  • F11 – 1/250s – iso 100
  • F11 – 1/200s – iso 100
  • F11 – 1/125s – iso 100
  • F11 – 1/80s – iso 100
  • F11 – 1/50s – iso 100
  • F11 – 1/10s – iso 100

Comme vous pouvez le voir, seul le temps de pose évolue.

Puis viens la convergence totale qui va durer moins d’une minute : F11– 0.6s – iso 100. Pour les plus audacieux qui auraient un modèle, vous aurez aussi en même temps à le guider par talkie-walkie pour ajuster votre composition ! Une fois la totalité atteinte et dès vous commencez à nouveau à apercevoir le soleil, vous pouvez reproduire le même processus mais dans le sens inverse en augmentent graduellement la vitesse d’obturation.

Autre exemple de réglages, cette fois-ci pour l’éclipse annulaire à Oman. Là aussi, le seul paramètre qui diffère est le temps de pose.

  • F13 – 1/4000s – iso 100
  • F13 – 1/3500s – iso 100
  • F13 – 1/2000s – iso 100
  • F13 – 1/2000s – iso 100

A la lecture de ces derniers réglages, un constat me vient …. et pourquoi ne pas shooter à main levée ? Après tout, le temps d’exposition est très rapide et respecte largement la règle du 1 pour 1. A bien y regarder dans ce type d’éclipse, la lumière solaire reste encore très forte, c’est possible. L’autre avantage indéniable de shooter à main levée, c’est la mobilité ! Plus besoin de devoir déplacer le trépied et le temps perdu à devoir recadrer à chaque fois que vous vous déplacez. Notez que cette réflexion n’est valable que pour une éclipse annulaire du fait de son éclat ! Sûrement que je ferais le test lors d’une prochaine éclipse ….

Je déconseille fortement d’utiliser un téléobjectif à focale fixe, déjà cela vous limite en terme de cadrage. Ensuite les focales fixes sont souvent conçues pour être  « lumineuses » (f/2.8 par exemple) donc bien plus encombrantes. Cela vous va vous limiter si vous devez bouger. Pour finir, on cherche avant tout le détail et la profondeur de champ, or comme étant par définition plus lumineuse, avoir une grande ouverture n’est d’aucune utilité. Le temps imparti par ce type de phénomène laissant peu de place à l’improvisation, chaque détail compte !

Le plus important, vivez l'instant !

Quel que soit le type d’éclipses auquel vous comptez assister ( lunaire, partiel ou de soleil ) c’est avant tout un moment privilégié pour lever les yeux au ciel et admirer la brève union entre la lune et le soleil. Ces deux astres ont permis de voir émerger la vie sur terre et à de rares moments dans l’année, ils nous offrent un spectacle inoubliable. Pour en profiter pleinement sans danger, n’oubliez pas des lunettes de protection.

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